J'avais envie de vous montrer une petite merveille, visitée il y a quelques semaines, lors d'un déplacement vers mon fils aîné, histoire de voir s'il était bien installé
Dans la ville rose, en centre ville se dessinent les hauts murs de pierre de cet édifice du XIIIème siècle
Entre les colonnes de pierre, se dessinent des vitraux
Le bâtiment fut reconverti durant la Révolution et l'ordre religieux des prêcheurs qui l'habitait fut interdit
Il servit alors à abriter les armées de Napoléon, hommes et cheveaux compris, ce qui dégrada grandement les peintures
Iil faut sauvé par Prosper Mérimée, le même qui écrivit Carmen, devenu opéra célèbre, ou encore Colombo ( la femme, pas celui qui mène des enquêtes dans son imperméable beige)
Il chargea l'architecte Viollet Leduc, de mener les travaux de restauration.
Viollet Leduc fut le même qui restaura Notre Dame à Paris
Les vitaux datèrent donc de 1923, d'où leur grande modernité
Laissons là l'histoire pour nous plonger dans le bâtiment
Ces vitaux transforment la lumière qui y entre pour la rendre joyeuse, céleste, au point de jouer sur les murs de pierre et les faire chanter et m'enchanter
Au fil des vitraux, ce n'est que tableaux colorés sur les murs
Plongent du plafond des lumières verticales qui unissent le haut et le bas, telle une aspiration à l'élévation ou une coulée divine
( Nan, je n'ai pas fumé la moquette)
C'est une célébration, au delà du religieux, de ce que l'homme sait bâtir
Ces hautes fenêtres sont typiques de l'art Gothique, laissant entrer la lumière telle une dentelle de pierre et de fer
La spécificité de ce bâtiment est que les arches se rejoignent en haut de colonnes, dessinant comme des branches de palmier
délicatesse et équilibre
Chaque pierre semble avoir été choisie pour mettre en valeur l'ensemble
J'ai rarement vu tant de détails de pierre, de beauté intrinsèque.
On croirait voir une marqueterie en pierre
A ces pierres enchâssées entre elles comme autant de gemmes, se rajoute une résille sur les murs
Je suis émue de voir que ces dessins, faits à mains levées, même si elles sont restaurées, ont plus de 800 ans
Je crois voir le temps s'immobiliser, à regarder ce que d'autres yeux ont regardés ces siècles durant, ce que d'autres mains ont tracés aupravant
Ils semblent à peine vieillis
On ne dirait pas qu'ils ont été faits il y a 800 ans
Faits il y a 800 ans ?...
Qu'étais je moi même il y a 800 ans ? une poussière d'infini, non encore définie ?
D'où je viens ? de quel espace, de quelles structures ?
La science me dit que je suis faite de molécules, d'air, d'eau
Cet assemblage de molécules de O, H, C, il a bien fallu le prendre quelque part
Quand nous mourrons, enterrés ou brûlés, nous retournons à l'état des mêmes molécules O,H, C
Tel des Lego qu'on assemble, déassemble, réassemble, je suis donc formée des mêmes molécules que ces hommes avant moi, je suis un peu d'eux et eux sont un peu en moi
Et si j'en crois le cycle de l'eau, qui fait que la pluie tombe du ciel, coule dans la mer et s'évapore, c'est la même eau qui coule
Et cette eau passe les frontières, elle est la même molécule partout sur la Terre
Alors de la même manière, je suis moi aussi un peu de celui ou celle qui vit à l'autre bout de la planète
Nous sommes plus unis que nous ne le pensons
Et c'est la même eau partout sur la Terre, qui circule sur la planète et cela depuis la nuit des temps, depuis les premières plantes, depuis les dinosaures
Alors finalement, je suis moi aussi dépositaire de ce passé commun, celui de notre espèce mais aussi de tout ce qui est vie et non vie sur cette terre
Je suis un peu de ces rochers, de ces arbres, de ces nuages, je suis d'aujourd'hui mais aussi d'hier, je suis moi, je suis eux, je suis vous
Je suis finalement la manifestation multiformes d'une unité, stable dans l'espace et dans le temps, je suis de la Terre
J'ai eu un vertige le jour où j'ai réalisé cela, cette unicité dans la multiplicité
Comment peut on alors faire la guerre à ce qui nous est étranger, si dans le fond, l'autre c'est nous ?
L'histoire, finalement c'est notre histoire
Et cette planète qui nous abrite, il faut la protéger
Bon, bon, on se reprend.
Je reviens dans mes chaussures et je regarde ce qui reste sur les murs, je ne vois que magnificence malgré les dégâts
Que serais je moi, dans 800 ans ?
Les idées fusant partout dans la tête, je file faire un tour vers le cloitre et je ne résiste pas à faire cette photo d'une jeune touriste japonaise devant une colonne de pierre du cloitre
Ce cloître, promenade d'arches de pierre autour d'un jardin carré, était le lieu de déambulation des religieux qui y vivaient.
Il était lieu de vie, reliant les pièces entre elles, mais il était aussi lieu d'ouverture vers dehors, vers l'ailleurs, il était verdure dans la minéralité de la pierre, il était rappel de la nature éphémère pour ces hommes qui cherchaient le silence et l'éternité
Il devient aujourd'hui, lieu d'intériorité pour ce monde qui bouge.
C'est le lointain qui s'approche, le monde qui devient petit, à portée de tout.
C'est l'histoire de la libéralisation des femmes.
C'est le brassage des traditions diverses
C'est ce dehors qui aujourd'hui entre dedans
C'est aujourd'hui l'éternité qui appelle les hommes.
Si vous passez à Toulouse, je vous invite à voir de vos yeux ce couvent des Jacobins, il en vaut le détour.
J'espère que mon petit post méditatif ne vous aura pas trop perturbé, je vous avais dit que le blog pouvait prendre une tournure plus verte.
Peut être même pourrait il vous plaire
C'est que j'ai décidé que j'allais vous faire entrer un peu de plus - de temps en temps- dans ma tête.
Rdv au prochain post pour de nouveau du laineux